20 avril 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-16.733

Troisième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:C300296

Texte de la décision

CIV. 3

SG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 avril 2023




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 296 F-D

Pourvoi n° X 21-16.733




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 AVRIL 2023

1°/ M. [C] [M],

2°/ Mme [D] [U], épouse [M],

tous deux domiciliés [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° X 21-16.733 contre l'arrêt rendu le 25 février 2021 par la cour d'appel de Basse-Terre (1re chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [I] [Z],

2°/ à Mme [E] [X], épouse [Z],

tous deux domiciliés [Adresse 3],



3°/ au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3] représenté par son syndic la société Sprimbarth cap Caraïbes, société à responsabilité limitée dont le siège est [Adresse 1],

4°/ à la société Sprimbarth cap Caraîbes, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, quatre moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Grandjean, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. et Mme [M], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Sprimbarth cap Caraîbes, de la SCP Ghestin, avocat de M. et Mme [Z], après débats en l'audience publique du 14 mars 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Grandjean, conseiller rapporteur, Mme Andrich, conseiller, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 25 février 2021), dans l'ensemble immobilier [Adresse 3] soumis au statut de la copropriété, M. et Mme [Z], propriétaires de la villa n° 1, ont sur autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires du 25 juin 1996, créé une chambre supplémentaire et, sans autorisation, édifié une terrasse dans le prolongement d'une coursive.

2. Les 27 janvier et 2 février 2017, M. et Mme [M], propriétaires de la villa n° 2, ont assigné, M. et Mme [Z] en suppression d'une vue directe créée par les travaux de surélévation, en destruction de la terrasse et en indemnisation de divers préjudices, ainsi que, la société Sprimbarth cap Caraïbes, syndic de la copropriété, en indemnisation du préjudice résultant de son défaut de diligence à faire respecter le règlement de la copropriété.



Recevabilité du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3], examinée d'office

Vu les articles 609 et 611 du code de procédure civile :

3. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des textes susvisés.

4. Le pourvoi en cassation n'est recevable que contre une personne qui a été partie à l'instance ou au profit de laquelle une condamnation a été prononcée.

5. M. et Mme [M] se sont pourvus en cassation contre le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3] (le syndicat des copropriétaires) qui n'était pas partie à l'instance ayant abouti à la décision attaquée, et qui n'est pas bénéficiaire d'une condamnation prononcée par cette décision.

6. En conséquence, le pourvoi n'est pas recevable en ce qu'il est dirigé contre le syndicat des copropriétaires.

Examen des moyens

Sur les deuxième et quatrième moyens


7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

8. M. et Mme [M] font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable leur demande en condamnation de M. et Mme [Z] au paiement d'une indemnité au titre d'un surcoût de charges de copropriété généré par l'absence de modification de l'état descriptif de division, alors :

« 1°/ que, le point de départ de la prescription d'une action en dommages-intérêts est le jour où le dommage s'est réalisé, et non celui où la faute a été commise ; qu'en faisant courir le délai de prescription à la date de la réalisation par M. et Mme [Z] des travaux litigieux, et non à compter des assemblées générales de la copropriété fixant la dette de M. et Mme [M] au titre des charges, les juges du fond ont violé l'article 2224 nouveau du code civil ;

2°/ que, le point de départ de la prescription d'une action en dommages-intérêts est le jour où le dommage s'est réalisé, et non celui où la faute a été commise ; qu'en faisant courir le délai de prescription à la date de la réalisation par M. et Mme [Z] des travaux litigieux, et non à compter des assemblées générales de la copropriété fixant la dette de M. et Mme [M] au titre des charges, les juges du fond ont violé l'article 2270-1 ancien du code civil ensemble les articles 2222 et 2224 du même code. »

Réponse de la Cour

9. La cour d'appel a, par motifs propres et adoptés, constaté que l'édification de l'étage et de la terrasse était achevée en octobre 1997 et que M. et Mme [M], qui avaient pu mesurer, dès réception de la convocation à l'assemblée générale du 25 juin 1996, l'incidence des travaux, avaient été informés par leur locataire de leur déroulement.

10. Elle a souverainement retenu que, fin 1997, ils étaient en mesure d'engager toute action qui serait utile pour la préservation de leurs droits et d'éventuelles réparations indemnitaires.

11. Elle en a exactement déduit que le délai de prescription de l'action en paiement d'une indemnité, prévu par l'article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, qui avait couru à compter de la fin de l'année 1997, était expiré à la date de l'action en référé introduite en 2009 par M. et Mme [M].

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

13. M. et Mme [M] font grief à l'arrêt de déclarer irrecevables leurs demandes tendant à la démolition de la terrasse, alors « que seules les actions personnelles nées de l'application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 sont soumises à la prescription spéciale de l'article 42 de ce texte ; qu'en opposant à M. et Mme [M] la prescription décennale à l'action réelle tendant à faire cesser l'appropriation par un copropriétaire d'une partie commune, les juges du fond ont violé l'article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 2227 du code civil et 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 :

14. Aux termes du premier de ces textes, le droit de propriété est imprescriptible. Sous cette réserve, les actions réelles immobilières se prescrivent par trente ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

15. Selon le second, les actions personnelles nées de l'application de la loi du 10 juillet 1965 entre des copropriétaires, ou entre un copropriétaire et le syndicat, se prescrivent par un délai de dix ans.

16. Pour déclarer irrecevable la demande de destruction de la terrasse, l'arrêt, après avoir constaté que cette construction avait été édifiée sans autorisation sur l'emprise du terrain dont M. et Mme [Z] avaient la jouissance exclusive, retient que l'action en démolition se prescrit par dix ans.

17. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si, nonobstant le droit de jouissance privative dont M. et Mme [Z] bénéficiaient, la terrasse litigieuse ne constituait pas une appropriation de parties communes dont la cessation ouvre droit à une action réelle qui se prescrit par trente ans, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Mise hors de cause

19. Il y a lieu de mettre hors de cause la société Sprimbarth cap Caraïbes dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3] ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevable la demande de M. et Mme [M] en destruction de la terrasse édifiée par M. et Mme [Z], l'arrêt rendu le 25 février 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ;

Met hors de cause la société Sprimbarth cap Caraïbes ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre autrement composée ;

Condamne M. et Mme [Z] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par la société Sprimbarth cap Caraïbes et par M. et Mme [Z] et condamne ces derniers à payer à M. et Mme [M] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille vingt-trois.

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